Une icône de l’agriculture vaudoise en mutation
Plus d’un siècle de formation, de savoir et de développement Les écrits qui mentionnent pour la première fois la présence de vignes sur le lieu-dit de Marcelin datent de 1304. On rapporte alors qu’un coteau exposé plein sud, face au Mont-Blanc, domine la ville de Morges.
D’autres archives, datant du 17e siècle, soulignent également l’importance de ces terres propices à la vigne qui furent choisies en 1922 pour y établir l’École d’Agriculture et de Viticulture du Canton de Vaud, ainsi qu’un domaine viticole, agricole, arboricole et maraîcher, à des fins pédagogiques et expérimentales.
Depuis sa création il y a plus de 100 ans, la vocation strictement agricole du site de Marcelin a évolué avec l’urbanisation du bassin lémanique et le développement de sa population. Alors que la population vaudoise était de 379’589 résidents en 1950, elle a passé à 521’658 âmes en 1980 pour atteindre 846’303 habitants en 2023, essentiellement actifs dans le secteur tertiaire. Ainsi en 1992, un gymnase s’y établit, puis en 2002, le Centre d’Enseignement Professionnel. Dès lors, le site de Marcelin réunit la formation agricole, professionnelle, gymnasiale et les métiers de l’économie familiale, soit environ 3’500 jeunes.
En 2017, le domaine arboricole est repris par l’Union Fruitière Lémanique pour y réaliser des essais pour les arboriculteurs des cantons de Vaud et de Genève, et les 2 hectares du jardin potager sont cultivés par la Ferme de Pré Martin à Longirod, qui valorise ses produits dans un espace de vente sur le site de Marcelin. Les surfaces viticoles restent quant à elles rattachées à la Direction Générale de l’Agriculture, de la Viticulture et des Affaires Vétérinaires de l’Etat de Vaud ( DGAV-DAGRI ) qui les gère, tout comme les Hospices Cantonaux dotés de 5.3 ha de vigne à Villeneuve et de 2.8 ha à Aigle, ceci sous la responsabilité d’Olivier Viret en charge des cultures spéciales et de la protection des végétaux, précédemment responsable de la recherche vitivinicole nationale d’Agroscope. Les vignes de Marcelin sont cultivées par François Pernet et Nuno Carvalho sous la conduite de Philippe Meyer, oenologue cantonal.
Le Magaz’à vin, espace de dégustation et de vente, accueille les visiteurs les lundis, jeudis et vendredis de 16 h à 19 h ainsi que les samedis de 9h30 à 12h30 ; il est géré par Olivier Chabloz.
Le Domaine viticole de Marcelin s’étend aujourd’hui sur près de 7.5 ha de coteaux, sur lesquels près de 25 cépages sont cultivés. Parmi eux se trouvent des cépages rarement vinifiés en Suisse et dans le canton de Vaud, tels que le Grenache, le Mourvèdre ( tous deux originaires du Sud de la France ) et le Trousseau ( originaire du Jura français voisin ).
Marcelin sert de « domaine pilote » pour la formation des futurs vignerons et cavistes. Le Domaine est cultivé selon les principes de la biodynamie depuis 2016. Il est orienté vers des méthodes de culture, d’élaboration et d’élevage de vins novateurs. L’ensemble de la production est commercialisé sur le site de Marcelin avec près de 20 vins différents qui allient tradition et innovation.
La culture biodynamique impose l’absence d’herbicide et la nécessité de travailler le sol sous le rang de vigne afin d’éviter au maximum la concurrence des adventices pour l’alimentation minérale et hydrique de la vigne. Ces éléments sont également intégrés pour optimiser le taux de matière organique par le semis d’engrais verts et de couverts végétaux peu concurrentiels. La lutte contre les maladies fongiques comme le mildiou et l’oïdium implique, pour la vigne traditionnelle ( Vitis vinifera ), l’application à intervalles réguliers de fongicides organiques, en particulier le cuivre et le soufre combinés aux préparations bio-dynamisées.
Afin de réduire au strict minimum l’utilisation de fongicides, le Domaine expérimente le potentiel agronomique et oenologique de cépages aux résistances polygéniques contre le mildiou, l’oïdium, la pourriture grise et le black rot. Les cépages Divico et Divona d’Agroscope à Pully, le cépage français Floréal et deux cépages encore sous codes de sélection ( 257P blanc et 757P rouge ) qui ont été créés et sélectionnés par l’INRAE ( Institut National de Recherche pour l’Agriculture, l’Alimentation et l’Environnement ) et Agroscope-Pully, sont actuellement testés.
Le programme de création de cépages résistants se poursuit chez Agroscope, et l’Etat de Vaud finance une étape décisive qui consiste à croiser les plus résistants avec les cépages traditionnels tels que Chasselas, Pinot noir, Gamay et Merlot en vue d’obtenir des vins aux notes gustatives les plus proches possibles de celles des cépages de référence. Les premières dégustations laissent présager un bel avenir à cette orientation du vignoble vers des raisins sans produits phytosanitaires.
Le Domaine de Marcelin sert en outre de plateforme expérimentale et démonstrative pour la formation des élèves de l’École de Viticulture. Les 3e années des CFC de Cavistes ou de Viticulteurs peuvent vinifier un vin chaque année dans la cave de Marcelin. Cette année, ils ont réalisé un assemblage blanc composé de Chasselas et de Viognier ainsi qu’un Chardonnay pétillant. Ces deux produits sont en vente au Magaz’à vin, et les bénéfices serviront à financer des voyages scolaires et des sorties didactiques.
Outre les vins du Domaine, d’autres cuvées sont élevées dans les Caves de Marcelin. Ainsi, les Chasselas et les Pinots Noirs cultivés par les Établissements Pénitenciers de la plaine de l’Orbe ( EPO ) sont – au moment des vendanges, – livrés à Marcelin, où ils sont vinifiés et embouteillés.
Depuis 2023, le Domaine de Marcelin fait partie des initiateurs du projet romand « bottleback.ch » porté par un groupe de producteurs et productrices pour tester durant deux ans la réutilisation d’une bouteille lavable commune. Les réactions du public sont très positives avec un taux de retour des bouteilles important.
Il est enfin intéressant de relever que le Conseiller fédéral Guy Parmelin a suivi une partie de sa formation à Marcelin, il y a plus de 40 ans. De ces années, il conserve quelques « ficelles » qui lui servent aujourd’hui encore : « Toute formation est utile dans la vie. J’aime beaucoup aborder les problèmes de façon pragmatique pour être mieux à même de leur apporter des solutions pratiques. Cette approche s’inspire très certainement de l’enseignement que j’ai reçu à Marcelin » ( extrait du Journal de Morges – C. Jotterand – 2.9.2022 ).
Le Domaine de Marcelin, en associant formation et innovation, permet à la viticulture vaudoise de se profiler dans un avenir serein tout en respectant la tradition séculaire de nos vignobles. Que ce soit pour des élèves ou des particuliers, chaque visite du Domaine et du Magaz’à vin, conduit à de belles découvertes !
Domaine de Marcelin